CLL: De assepoester van de leukemies
(dixit: Dr D.Catovsky Royal Marsden London)

PARTIE 3: Transplantation des cellules souche
13 juillet 2010: Voici enfin le moment tant attendu. Le jour où je suis admise à l'hôpital pour la transplantation de cellules souche (appelée après TCS pour la facilité!). Chambre numéro 4 sera désormais mon univers, mon terrain de jeux, ... mon tout quoi! Une chambre isolée de 4,5 sur 4, salle de bains comprise. Je peux difficilement décrire l'effet de claustrophobie que l'on attrape au bout de quelques jours quand la porte reste inexorablement fermée. Cela doit aussi se sentir différemment par chacun. À moi, cela m'a fait l'effet d'un lent étranglement.
Jour -6: Je vous envoie mon adresse e-mail que vous pourriez utiliser pour me joindre lors de mon séjour. Un autre moyen n'est pas possible en ce moment. Je dois également m'adapter un peu de travailler qu'avec gmail ou Skype, mais avec un petit effort on arrive tous à communiquer. J'ai reçu un tas d'explications et sans arrêt on me demandait si j'étais prête, à tel point que je le leur ai demandé à mon tour. Qu'ils soient prévenus, car une forte dose de cortisones me transforme en vraie garce. Ma première journée "au couvent" s'est bien déroulée. On m'avait prédit depuis des semaines que le traitement me ferait perdre beaucoup de kilos. En arrivant dans ma chambre, je remarquais immédiatement un home-trainer et un step, maintenant je comprends de quelle façon ils veulent que je me débarrasse des kilos en trop!!!
Jour -5: Déjà levée et les gouttes de sueur dues au home-trainer sont également lavées (j'avoue que j'ai du les chercher). Ma copine Laurence du labo m'a téléphonée et elle a prise ma commande. Elle m'apportera le journal et un bon café pour entamer la journée. Aujourd'hui je reçois ma première chimio. Je l'ai déjà eue quelques fois, je ne me déplace donc pas en terre inconnue et cela ne me coupera pas l'appétit. Je suis infiniment heureuse avec mes boules quiès car ce bruit lancinant des ventilos à air me donne le sentiment d'être en avion, quelque part au dessus de l'océan, et que, au mieux, il ne va atterrir que dans un mois.
De hometrainer
Jour -4: Voici le résultat de ma visite au "boucher" d'hier. Malgré le fait que j'ai un "port a cath" - vous savez, cette boîte implantée qui sert à faire passer tous les pesticides liquides - il fallait placer un second cathéter. Puisque je suis allergique à tout ce qui reste coller (peut-être la raison pour laquelle je ne peux pas garder d'homme chez moi) et qu'on ne peut donc presque pas utiliser de matière autocollante, on avait décidé d'en placer un "sous-clavière" (sous la clavicule) du fait qu'il s'y trouve un endroit assez plat, au lieu d'une "jugulaire" (partant du cou vers le bas), ce qui est beaucoup plus compliqué à cause des mouvements rotatives de la tête. Quand je suis arrivée dans la salle d'opération, cet anesthésiste n'a en rien tenu compte de ce qu'on lui avait dit de faire. Il voulait placer une jugulaire, point final! J'étais encore trop faible dans ma tête pour réagir à cause de la chimio. Il commençait par me donner deux petites injections de xylocaïne lorsque, en ôtant la seconde aiguille, il attrapait déjà la grosse aiguille et enfonçait ce cathéter avec toute sa force. Il n'y avait encore aucun effet anesthésique et je hurlais de mal. Une femme préfère encore mettre dix enfants au monde que de subir cela. En plus, il avait collé un simple pansement, or qu'on le lui avait formellement interdit. Ensuite, je devais encore passer une radio pour contrôler si le tout était correctement en place. De retour dans ma chambre j'étais épuisée et on a remué ciel et terre pour limiter les dégâts. Je me dois de signaler ici que l'infirmerie a vraiment mis tout en oeuvre pour moi. Je leur dois un grand merci. Il est toutefois incroyable qu'une personne puisse être entourée de la meilleure équipe médicale, soignante et thérapeutique qui existe et que tout cela peut être fichu en l'air à cause d'un seul homme. Tournons la page, c'est fini. J'étais éreintée.
Jour -3 et jour -2: Il faudra supporter aujourd'hui et demain encore la lourde médication, cela ne pourrait que me donner de la fièvre. Je me demande s'ils auront raison. Pendant ce temps, mon estomac et mes intestins sont complètement retournés. Je ne peux plus manger ni avaler des comprimés ... Bon ce ne serait pas si grave si au moins je ne continuais pas à prendre du poids. Tout le monde me dit que c'est l'eau. Je ne peux que le croire. Je dois avouer qu'on me soigne bien ici. Tout le monde est aux petits soins. J'ai passé deux journées affreuses et je ne sais plus de quelle planète je proviens. Les amis me demandent souvent comment je vais. Répondre à cela me paraît la chose la plus difficile en ce moment. La journée peut commencer relativement bien et tourner au cauchemar en quelques heures. Sans l'avoir vécu on ne peut pas l'imaginer et c'est, en plus, différent pour chacun.
Jour -1: Dimanche, donc repos! Je n'ai fait que dormir les trois derniers jours. Je crois qu'on m'a administrée une dose massive par mon baxter. ;-)! C'est probablement mieux ainsi. Dormir est le seul passe-temps idéal.
Jour 0 - mardi 20 juillet 2010: La chimio est terminée. On entame la cyclosporine afin d'éliminer complètement mes leucocites! Je dois toucher du bois car, jusqu'à maintenant, je n'ai pas encore eu de fièvre. Je ne mange presque pas, je ne bois pas, et pourtant je prends 500 gr par jours, aujourd'hui même 800 gr! Je panique une peu de plus en plus, si je dois rester un mois, il va falloir chercher la balance de l'abattoir d'Anderlecht. Jour-J ils appellent cela ici, moi je dis jour-D et le professeur Gribben dit bye-bye jour C (pour les nouvelles cellules). La transplantation s'est faite parfaitement sans problèmes et je me sentais très bien jusqu'à l'arrivée d'une forte migraine cet après-midi. À cause d'une fièvre éventuelle on ne pouvait pas me donner un simple Dafalgan mais un Contramal. Il était moins une car j'y faisais une réaction atroce. Je croyais la fin arrivée, ce qui n'arrivait heureusement pas, sinon je n'aurais pas pu écrire tout ceci.
Jour +1: Pour autant que cela puisse durer, je viens de revenir parmi les vivants. On m'avait mis la médication nécessaire dans mon baxter pour me soutenir à travers la période de malaises et de vomissements. Cela va un peu mieux en ce moment et je ne parle plus avec la langue gonflée, ce qui ne veut pas dire que je ne l'ai plus! Croyez-moi si je vous dis que le monde se retourne quelques fois lors d'une transplantation. Je ne peux pas répéter assez comme le personnel ici est gentil et professionnel! C'est peut-être un vieux bâtiment mais on se trouve dans la Rolls des hôpitaux en cas de cancer.
Jour +2: Puisqu'on m'administre tous les jours de la Cyclosporine afin que mon corps ne rejette pas les nouveaux allemands mâles (grands beaux blonds aux yeux bleus), toutes mes valeurs retombent à zéro. Jeudi c'était vraiment trop bas avec comme effet que j'étais un peu plus cadavre que vivant. On a immédiatement réagi avec quelques bouteilles de Chardonnay (en tout cas, cela y ressemblait ou bien c'était une nouvelle version) et avec deux sachets de Merlot Grand Cru (sang). Grâce à cela, je me trouvais en super-forme le lendemain, prête à faire la descente du Col du Noyer. Ce va-et-vient allait certainement encore durer une dizaine de jours, jusqu'à ce que ces cellules souche du donneur feront enfin le boulot pour lequel elles ont été importées. J'étais déjà en sérieuse discussion avec eux lors de leur entrée par 5.000.000, car ils voulaient tous aller au même endroit! Pour cette fois, j'aimerais qu'ils gagnent.
Jour +3: La journée a commencé comme prévu: en forme de tonnerre tandis que maintenant, cela ressemble à une étape plate du Tour de France. Je me sentais pourtant super. Les deux derniers jours j'avais une kiné, une dame charmante qui me faisait faire quelques mouvements de jambes, 3 exercices à répéter dix fois. Par contre aujourd'hui, c'était au tour d'un kiné d'un autre calibre. Un homme comme un arbre et encore d'une amabilité fantastique, avec des mains d'or pour débloquer un nerf ou un muscle coincé. J'ai vraiment l'impression que la personne qui embauche à Bordet se base sur deux critères: la professionnalisme et l'amabilité envers les patients. Monsieur Delgado allait travailler tellement ma condition que mes amis du tennis n'en reviendraient pas à mon retour. Ce soir pourtant, ma "jugulaire" commence à me faire mal pour la première fois et perd un peu de liquide. Après toutes mes opérations ceci est un signe bien connu que - après quelques jours de cathérisation centrale - ma peau commence à en avoir assez et rejète cet objet étrange.
Jour +5: Comme j'avais eu le pressentiment, le Merlot a été sorti, en même temps qu'un sachet d'Hoegaarden (plaquettes). Je nomme tout selon son apparence, dans ce cas-ci, je trouve que le contenu des plaquettes ressemble à une bière blanche d'Hoegaarden restée un peu trop longtemps sur le comptoir et n'ayant donc plus de mousse.
Jour +6: Ma "Jugulaire" me fait de plus en plus mal et, à cause du risque d'infection, on a décidé de me l'enlever. Une journée de fête en somme! Encore vite un sachet d'Hoegaarden pour éviter que je continue à saigner quand on l'ôtera.
Jour +7: À partir d'aujourd'hui je devais prendre la Cyclosporine oralement mais on m'a dit que ce sont des comprimés énormes, un nouveau gros problème pour moi. J'ai tout de suite envoyé un e-mail à Londres par mon ordinateur portable pour demander au professeur Gribben s'il connaissait un alternatif à ce problème. La réponse revenait en vitesse de TGV. Au lieu de prendre ces pilules de cheval comme il dit, ce produit était aussi disponible en forme liquide à base d'huile. La dose journalière devait être mélangée à un autre liquide: p. ex. du jus d'orange (chaque fois au même liquide). John me disait que je n'avais qu'à imaginer que je buvais de la vodka orange. Je n'avais jamais bu cela mais comme il me connaît tellement bien, je faisais ce qu'il me proposait. Je dois avouer que le breuvage me convenait. J'ai passé le message à l'équipe soignante et en moins d'une demie heure, j'avais le tout dans ma chambre avec toutes les notices. Comme j'indiquais déjà avant, il n'y a pas assez de superlatifs dans le Larousse pour décrire comment ils sont ici. C'est d'une importance doublement capitale pour un patient du cancer. Les infirmiers et les soignants forment tous une réelle famille pour le temps que l'on est ici. Une donnée qui revient à chaque fois durant de longues années.
Jour +8: La matinée était OK. Les leucocytes étaient déjà depuis quelques jours à 40-50 unités: trop peu donc pour participer â la coupe du monde, juste assez pour faire un match à domicile à Anderlecht. Dans l'après-midi, je me sentais une nouvelle fois horrible et une migraine pointait son nez. Je ne recevais pas de Perfusalgan puisque ma température dépassait le 37°C. J'ai été me coucher dans le noir sur mon lit avec mes écouteurs et, deux heures plus tard, ma température avait baissée et j'avais donc droit au Perfusalgan. J'ai pu prendre mon somnifère et je me suis endormie.
Jour +9: Puisque j'étais chaque fois réveillée vers 5h du matin, et que je me sens toujours bien le matin, je commençais ma matinée avec des exercices de genoux et une Bachata (ici, j'ai un CD complet d'Aventura sur mon ordi portable) afin de reconstruire ma condition. En matière de condition je reviens de loin. Avec 200.000 leucocytes on n'arrive vraiment pas loin ni vite. J'ai eu un grande nouvelle au petit-déjeuner: Patrick, le chef de service, est venu me raconter personnellement que mes allemands (cellules souche) sont au nombre de 160. Pas encore assez pour lancer une compétition belge mais on est en bonne voie. Nous avons remporté la première bataille. Le stress des derniers mois me quittait tout à coup, j'ai pleuré des larmes de joie tout l'après-midi et je n'en avais même pas honte! J'avais besoin d'un gros câlin britannique pour partager mon bonheur.
Jour +10: Tout suit simplement son cours maintenant et je ne peux certainement pas m'en plaindre. Il suffit d'attendre comment mes neutrophiles - qui font partie de mes leucocites et qu'on appelle mes soldats blancs, comme on l'apprend si bien aux enfants à l'école - vont se profiler.
Jour +11: Mes amis allemands sont au nombre de 240 aujourd'hui, ils le font à leur aise et j'apprécie cela. Ils n'ont donc pas encore sorti l'artillerie lourde. Il n'y a que que ce mal de tête, c'est le seul problème en ce moment, mais on y trouvera une solution, c'est sûr!
Jour +12: J'ai pris un shampooing ce matin, la brosse était remplie de cheveux et mon cuir chevelu me faisait terriblement mal. Je venais de demander à ma fille Sari de m'apporter mon Ladybliss mais je lui ferai un message que ce n'est plus la peine probablement. Ma sœur m'a donné quelques beaux bonnets, que je pourrai mettre quand ma pelouse dévoilera des endroits vides. L'infirmerie me remarquait qu'il serait plus simple de tout raser. Ce sera au programme de demain. Je n'aurai qu'à leur demander aussi si je ne peux pas quitter cet avion maudit et de me déménager vers la cage aux poules ;-).
Jour +13: Mes amis allemands sont à 720. Je suis fière d'eux et nous nous entendons à merveille. Ce midi le tondeur de mouton est passé, seulement, ce n'était pas de la laine blanche qui tombait mais du Garnier numéro 36. Puisque mes cellules donneurs sont d'origine masculine, mes copains du labo m'appellent Mio au lieu de Mia! Mes filles Sari et Elin m'ont apporté mon disque dur externe et j'ai été occupée hier à mettre de la musique sur mon ordi portable. J'ai assez de musique pour tenir un mois, mais cela n'arrivera pas si cela tient à moi.
Jour +14: Que j'ai mal dormi cette nuit! J'ai finalement du avaler deux comprimés et surtout pensé "je m'en fous". Je ne me sentais pas dans mon assiette, je pensais à beaucoup trop de choses et surtout à cette obligation de dormir. Je ne devrais pourtant pas m'en faire mais cela ne va pas à cause du filtrage d'air. Ma boule rasée ne supporte vraiment pas ce courant d'air, et mes jambes détestent ces milliers de fourmis. Mais enfin, il fait à nouveau jour et j'ai reçu de bonnes nouvelles du Dr Lewalle, mon médecin de transplantation. La vie me semble d'un coup plus rose. Demain ou après-demain les portes de ma chambre pourront enfin s'ouvrir et mon enfermement sera, je l'espère, à jamais du passé. Les prisonniers eux, peuvent prendre l'air au moins une fois par jour, moi je n'ai plus vu, depuis trois semaines, de ciel bleu, blanc ou gris. C'est cela qui me manque le plus et encore je ne suis pas ici en hiver. Je les plains vraiment ces patients-là.
Jour +15: J'ai été réveillée vers 5 heures ce matin à cause d'une pompe à perfusion qui débloquait plus ou moins. Je n'ai plus pu me rendormir. J'ai encore écouté un peu de la musique et je me suis quand-même levée pour faire ma toilette. Après celle-ci, il était temps pour ma Bachata et pour mes exercices de fysio. Vers 10 heures Patrick, le chef de service, est venu m'annoncer la bonne nouvelle que mes amis étaient déjà 1.200 dont 600 neutrophiles. L'heure de midi s'approche et je me sens éteinte. Je crois que ce sera tout pour aujourd'hui.
Jour +16: L'ergothérapeute est passée me voir hier après-midi. Elle m'a montré comment plier des foulards pour couvrir ma boule de billard. J'ai quelques bonnets mais elle ne trouvait pas cela assez féminin. Je devais me rendre extra belle et plier les différents foulards chaque fois différemment. Je l'ai laissée parler. Me rendre belle ne m'intéressait pas lorsque j'avais des cheveux et cela ne changera pas maintenant. Je n'ai pas osé dire à cette gentille dame que ma sœur m'avait apporté un bonnet super marrant. Elle aurait sûrement voulu coudre un foulard par-dessus, ça je l'aurais juré. Comme je n'ai jamais pu dormir plus de 4 à 5 heures d'affilée depuis que je suis à l'hôpital, je me sentais exténuée ce matin. Après le petit-déjeuner et les soins journaliers, j'ai demandé à Patrick, le chef de service, de laisser fermée ma porte pour toute autre personne que celles des soins. En ce qui me concerne, il aurait même pu ajouter un cadenas supplémentaire. J'étais tout simplement vidée. Je me suis allongée sur mon lit avec mes écouteurs, et je me suis endormie jusqu'à midi sur les sons de musiques douces. Après le repas, je me suis rendormie jusqu'à 16 heures. Pour l'instant je me sens un peu potable. Ce midi le professeur Bron, pourtant pendant ses vacances à elle, m'a téléphoné pour savoir comment je me sentais. Elle me racontait que j'avais besoin d'une transfusion à cause de mon taux d'hémoglobine trop bas. Trop peu d'oxygène vers le cerveau me font devenir une vieille hargneuse et une invivable patiente. Le soir j'ai reçu deux sachets de Merlot Grand Cru, et déjà après que le premier se soit vidé dans mes artères, je sentais mon énergie me revenir (je dois être un sacré vampire pour réagir autant sur une transfusion sanguine). ;-)
Jour +17: Une journée comme les autres. Le matin "superwoman" et l'après-midi "empty woman". Après une bonne sieste de deux heures, je me sens à nouveau un peu rechargée pour le reste de la journée.
Jour +18: J'avais vraiment espéré que la fermeture soit enlevée de ma porte, je devrai probablement attendre jusqu'à demain. La journée s'est déroulée comme celle de hier!
Jour +19: C'est enfin aujourd'hui qu'on doit enlever la fermeture de ma porte. Mes amis allemands en ont décidé toutefois autrement. Eux aussi étaient en weekend et ont pris congé, avec comme résultat que mes valeurs sont restées inchangées par rapport à vendredi. Pourtant, le régime s'est assoupli. Je ne dois plus manger stérile, seulement sélectionné. Sari a pu entrer aujourd'hui et nous avons pleuré de toutes nos larmes. Nous avons fait des tonnes de câlins. Mercredi ce sera au tour d'Elin et de Sofia. Elles m'ont déjà prévenue la veille: "be prepaired for the Hug-monster" ;-).
Jour +20: Mes copains allemands sont vraiment à l'aise, seulement 800 neutros aujourd'hui, j'espère pouvoir compter sur leur "Gründlichkeit" légendaire. Cela se traduit par le fait de devoir rester quelques jours de plus à l'hôpital. Pourtant, je me trouve en forme à mes normes à moi. Très vite fatiguée, d'accord, mais cela dure depuis 12 ans. Je ne peux d'ailleurs plus m'imaginer à quoi ça ressemble d'être en bonne santé. J'essaie d'imiter le plus souvent les gens en bonne santé et d'imiter aussi un peu leur niveau. J'ai toutefois appris que c'est une utopie, même à essayer, quoique j'y persiste trop souvent. Peut-être devrais-je arrêter avec cela et accepter que je ne suis pas en bonne santé et que je devrai faire avec, sans forcer. Cela éviterait probablement beaucoup de stress à mon corps. Après une aussi importante intervention que celle d'une transplantation, il est préférable de laisser le bon sens prendre le dessus par rapport à ce qui se passe dans la tête, car je veux toujours que tout se réalise immédiatement.
Jour +21: Mes allemands le font vraiment à l'aise, ils ne sont qu'à 100 neutrophiles en plus! Le résultat de 4 jours. Le professeur Gribben m'assurait que ceci est normal et que je ne devais pas m'en faire. C'est vraiment un formidable ami après 10 ans de ballade avec miss LLC. La nouvelle la plus fantastique est que je pourrai rentrer chez moi demain!! Nous avons vaincu l'enfer. Il s'agit dorénavant de bien tenir à l'œil le chemin dangereux d'un éventuel rejet mais je vais m'entraîner à la "promenade tranquille" et si tout va bien, après je remettrai le compteur sur "marche".
Jour +22: On est le 12 août 2010! Il y a un mois que je suis entrée dans ce couvent (sans nonnes) pour pouvoir le quitter exactement un mois plus tard. J'ai du mal à imaginer que cela fait déjà un mois. Je ne peux jamais assez remercier le personnel médical et soignant ici. Ils ont toujours travaillé ensemble comme une équipe soudée et jamais je n'ai vu quelqu'un de mauvaise humeur dans ma chambre. J'ai été dans beaucoup de cliniques pour de multiples interventions mais je n'ai jamais connu ceci. C'est vraiment un second chez moi!On devra de toute façon faire le chemin ensemble jusqu'au bout mais j'espère pouvoir tenir maintenant un certain bout de temps sans aucune nouvelle thérapie. La guérison n'existe pas encore, donc il est prépondérant de faire de notre mieux et de penser que la rémission peut être longue. Dans 4 ans ma fille cadette aura 18 ans et j'aurai réussi. Elle n'avait même pas deux ans lorsque j'ai reçu la mauvaise nouvelle de la leucémie, et c'est pour mes filles que j'ai continué à me battre. Chaque jour est un jour de gagné. Actuellement je n'arrive pas à comprendre où j'ai pu puiser cette énergie pour combattre cet enfer pendant ces 12 années, de plus, avec la science de me savoir appartenir dans le groupe des LLC avec les moins bons pronostics. Mais ne regardons pas en arrière. Un nouveau grand pas est franchi. En route vers le prochain.


